Si on devait donner une recette pour se démarquer de cette foule de concurrents, le canevas reposerait sur plusieurs éléments.
D’abord soignez votre aspect physique. C’est lui qui appelle le regard avant même que la voix et le discours n’interpellent l’oreille. BT a donc opté pour son style. Gageons qu’il l’a ardemment travaillé. Si l’émissaire de François Chérèque est le bouc savamment taillé autour de la bouche, BT a désigné la coupe au bol dans son dégradé soigné, et sa frange sèche. Un symbole, sa marque de fabrique. Certains le moqueront, d’autres se contenterons de l’apercevoir plus aisément de loin. Tous peuvent admettre que dans n’importe quelle partie du monde, vêtu du plus déstabilisateur déguisement qui soit, si loin de celui d’un patron de
Le second élément de choix devrait être la précocité et un goût certain pour gravir chaque étape dans un temps de passage digne d’un champion du monde ès syndical.
Rien ne prédisposait pourtant ce jeune garçon aux hautes sphères de
Commence alors son idylle syndicale. A 18 ans, il adhère à
C’est une véritable course aux titres et aux fonctions. Elle s’avère être sans faute, dans le plus bel esprit apparatchik. Elle se poursuit, régulièrement, sans sourciller. Il a 21 ans lorsqu’il devient secrétaire du syndicat de son dépôt. Il lui faut trois ans de plus pour ravir le secrétariat des cheminots CGT Paris Est. En 1987, il rejoint le Bureau fédéral des cheminots CGT et adhère au Parti Communiste. En 1997, il entre au Bureau Confédéral cégétiste.
1995, les grèves chahutent la droite et le gouvernement Juppé. BT est encore là, aux premières loges. Il devient l’un des symboles du renouveau de la CGT. Les modes de fonctionnement qu’il avait participé à intégrer dans les grèves de 1986 trouvent dans ces mouvements, leur consécration.
Voilà BT bien pourvu. Il a la coupe, il a le parcours. Il lui restait à acquérir ses victoires sur le terrain, le panache d’une lutte au forceps. Son Pont d’Arcole traversé, il fait face aux militants de la CGT en 1999, lors du 46e Congrès de la confédération. Louis Viannet tire sa révérence, et BT avance. Il est élu secrétaire général du syndicat, le 13e et le 5e d’origine cheminote, 22 ans après avoir rejoint la Confédération. La coupe de cheveux n’a pas eu le temps de changer. Seul le cheveu s’est quelque peu blanchi, et les traits se sont-ils creusés.
Désormais, il porte l’institution cégétiste sur les épaules. Et le bagage cégétiste est lourd. Lourd d’histoire et lourd de clivages profonds. Les grèves du 20e siècle, la 1e guerre mondiale, la révolution bolchevique ou le Parti Communiste sont quelques unes de ces lignes de partage. Elles ont finalement abouti au fossé entre les réformateurs, souvent majoritaires, et les révolutionnaires, anarchistes et communistes. Et conséquences majeures aux scissions de 1921 et de 1947 ainsi qu’à la création de
Pour satisfaire à ces exigences, BT a un avantage pour lui. Il arrive masqué. Il a été formé dans la plus pure des traditions cheminotes. Celle là même qui a porté les coups les plus durs contre la ligne réformatrice de
Un article de Sébastien Deslandes.